Nous avons donc
repris la mer le mardi 14 janvier au matin !
Car le lundi 13, en
allant régler la marina, nous avons appris que si nous restions un jour de plus
nous passions dans une tranche tarifaire
beaucoup plus intéressante pour nous. Qu’à cela ne tienne !! nous
ajournons notre départ et avons ainsi le plaisir d’être crédité par la marina
de 300$ !!
Nous revoilà donc sur
l’eau…nous croisons tous les gros cargos en attente de leur passage dans le
canal et, après les avoir dépassé, nous perdons très vite la terre de vue.
Pendant les huit
premières heures de navigation, j’ai cru avoir pu reprendre la mer en toute
impunité, sans que mon corps y trouve à redire… mais cette douce illusion n’a
duré que huit heures !! la nature a vite repris ses droits et, petit à petit j’ai senti le mal de mer
s’emparer de moi….. viiiiiite mon seau !!! Car il faut vous avouer que je
ne sais pas être malade par dessus bord, j’ai la délicatesse de prendre un seau
quand je suis en haut ou l’évier quand je suis en bas… eh oui !! chacun
ses petites manies !! mais en plus de l’envie de vomir c’est être à la
limite de tomber dans les pommes qui est dur…. Chaque action vous pompe toutes
vos forces…toute votre énergie… le geste le plus anodin vous tue littéralement…
Pendant que
j’assumais tant bien que mal, Xavier ressentait aussi une très grande fatigue,
et, au contraire de moi, il n’arrive pas à trouver un sommeil réparateur… il
faut dire que mon insouciance m’aide beaucoup de ce coté là ! Lui a les
soucis qui incombent à un capitaine !!
Vingt quatre heures
se sont ainsi écoulées, entre somnolence, gros coup de chaud, fatigue extrême
et puis, comme d’hab, d’un coup d’un seul, je me suis senti mieux, beaucoup
mieux… une bonne douche et un café finirent de me remettre sur pieds. Xavier
reprit aussi des forces.
C’est à ce moment là que, le vent nous
poussant trop à l’ouest, nous décidâmes d’affaler les voiles pour mettre le
moteur et remonter directement le vent dans le nez, vers l’île de la
Providence.
Tout se passait bien
si ce n’est la rage du capitaine qui aurait vite tendance à se croire maudit par
Eole…
« Pourquoi le
vent vient-il toujours de là où on veut aller ?? » ce à quoi j’avais
envie de répondre que si on ne voulait pas dépendre du vent il eut plutôt fallu
acheter un bateau à moteur… mais une telle réflexion n’aurait pas vraiment
aidé…..
Après une petite
heure de moteur, de gros nuages noirs assombrirent le ciel, « un grain arrive » observe le
capitaine…. Et quel grain !!!! le vent monte à trente trois nœuds en une
minute, la mer se hache et ses vagues deviennent limite hostiles, le bateau
tape fort, nous sommes très secoués mais ce n’est qu’un grain !! et un
grain ça passe !! sauf que celui ci va durer sept bonnes heures… pour la
première fois nous mettons nos gilets de sauvetage, Xavier est inquiet, il en a
marre… enfin nous croyons discerner les contours d’une île montagneuse pas si
loin que cela mais complètement dans les nuages bas. Regardant la carte nous
avons deux possibilités : l’une qui est de prendre assez vite sur la
droite où la carte nous indique un passage entre des rochers ce qui est plus
dangereux surtout par les conditions difficiles que nous avons, et l’autre est
de remonter un peu plus au Nord pour emprunter un chenal bien balisé afin
d’entrer dans le mouillage sans soucis. Il est dix sept heures, la nuit va
bientôt tomber , la carte semble très juste et nous voulons arriver de jour…
nous décidons donc de prendre le chemin le plus court !
Nous suivons la carte très précisément et tout semble très bien se passer… sur la première colline se détachent les silhouettes de trois hommes armés de mitraillette et c’est à ce moment là que je réalise que je ne sais pas à quel pays appartient cette île…
vous les voyez? les gardes en haut de la colline? |
Nous suivons la carte très précisément et tout semble très bien se passer… sur la première colline se détachent les silhouettes de trois hommes armés de mitraillette et c’est à ce moment là que je réalise que je ne sais pas à quel pays appartient cette île…
Heureusement nous avions pris la précaution de hisser le pavillon jaune qui signifie « je suis prêt à faire les formalités douanières »
Sur le canal 16 de la
VHF, un allemand parle et parle … mais pas le temps de l’écouter.. .Trop
occupés à regarder la carte, les fonds…
Nous arrivons enfin
au mouillage, y jetons l’ancre… ouf !! Harassés mais contents d’être
arrivés !
Arrive alors une
annexe avec à son bord… un allemand… l’allemand de la VHF … Thomas… affolé
qu’on ne soit pas passé par le chenal Nord, très inquiet qu’on ait des
problèmes… « mais pourquoi êtes vous passé par là ?? il y avait plein
de rochers, c’est de la folie, je vous ai appelé sur la VHF pour vous dire de
faire demi tour… « ce à quoi je réponds que nous en avions marre et que
la carte semblait juste…. Après les
bienvenues d’usage qui ne sont malheureusement plus du tout d’usage dans les
mouillages, notre ami allemand nous donne toutes sortes d’indications sur
l’île, où faire la clearance, où trouver du wifi etc…
Merci Thomas !! mais dans quel pays sommes nous s’il te plait ??? l’air un peu surpris de mon interlocuteur me fait sourire.. il est vrai que j’aurais pu me renseigner avant.. Eh bien nous sommes en Colombie !! Cool !! on va pouvoir sortir le drapeau jaune pour hisser le vrai drapeau colombien !!
Merci Thomas !! mais dans quel pays sommes nous s’il te plait ??? l’air un peu surpris de mon interlocuteur me fait sourire.. il est vrai que j’aurais pu me renseigner avant.. Eh bien nous sommes en Colombie !! Cool !! on va pouvoir sortir le drapeau jaune pour hisser le vrai drapeau colombien !!
Un bon thé, une dîner léger et au lit…(même pas de ti punch !! c’est vous dire le degré de fatigue) je crois que nous avons mérité notre repos… enfin surtout Xavier qui avoue se sentir un peu seul et abandonné dans des moments d’inquiétude tels que ceux que nous venons de vivre. Il est vrai que dans ces cas là, je reste allongée à ne rien dire et j’attends que ça passe… Pour me défendre un peu je rappelle au capitaine que j’ai fait son quart du matin pour le laisser se reposer !! (entre nous, aucun mérite de ma part, j’adore faire les quarts !! ce sont, je crois, mes moments préférés de la navigation)
Nous voilà donc sur
l’île de la Providence qui doit bien tenir son nom de quelque part, il est vrai
que pour nous c’est une halte très attendue !
Demain nous serons le
17 janvier, nous irons à terre faire la clearance, et nous aurons peut être la
chance de parler à certains d’entre vous et aussi de regarder ce que donne la
météo pour les prochains jours ; alors nous déciderons quand
repartir !
Mais dans ce genre de
voyage, les projets peuvent évoluer très vite.. en effet, renseignements pris,
cela nous couterait 150$ de rester plus de vingt quatre heures sur l’ile… nous
décidons donc de repartir , juste le temps de se reposer une bonne nuit, de
faire la connaissance de plusieurs équipages de bateaux au mouillage que nous
espérons revoir plus tard à Cuba pour les Danois et au Guatemala pour Thomas et
Ulrike, les allemands.
Mais avant de partir
nous faisons un petit tour sur l’île ; les décorations de Noël sont encore
bien en place autant dans les maisons que dans les rues.
Point d’internet avant 16h, cela fera trop tard pour nous, skype et messages divers devront attendre mais nous restons près de vous tous par la pensée !! Au cours de la ballade nous assistons à une rixe… pas tendre… en deux temps trois mouvements, quelques cris, bousculades, les bouteilles que l’on casse sur le coin d’une table pour utiliser le coupant du tesson et cela dégénère très très vite en une bagarre d’une extrême violence… mais tout aussi vite les deux protagonistes se retrouvent cote à cote dans la voiture de la police !
Sayann au mouillage de l'île de la Providence |
Et puis à 17 h nous voilà repartis après avoir dit au revoir aux copains du mouillage.
Nous arrivons
maintenant à la deuxième partie de la traversée, j’aurais voulu, chaque nuit,
tenir un petit journal de la journée mais cela me fût totalement impossible,
d’abord pour la simple et bonne raison que nous avons été tellement secoués,
sans aucun moment de répit, sans aucun arrêt qu’il m’était totalement
impossible d’écrire et puis le moral du capitaine était si atteint que je
n’aurais pas pu vous dire autre chose que « le vent vient de là où nous
voulons aller.. » Toute la journée et la nuit aussi, la même question
revenait sans cesse, « quelle route faut il prendre ? » il est
vrai que le dilemme était grand et taraudait Xavier ; je dois dire que je
ne prenais pas grand part aux décisions ! d’où l’humeur maussade (et
quelquefois même plus) du capitaine. Il se faisait du soucis, beaucoup de
soucis et je le voyais très inquiet alors que je ne l’étais pas tant que ça et
je pense que cela avait tendance à l’énerver encore plus. Après tout il nous
restait une semaine avant l’arrivée de Gabriel, on mettrait le temps qu’on
mettrait, on avait à boire, à manger alors à Dieu va !! mais Xavier ne
voyait pas la situation du même œil… il est vrai qu’un problème se posait sans
cesse : vu que nous avions le vent de face, soit nous prenions la route à
l’ouest mais les courants nous emmenaient beaucoup trop à l’ouest, vers la côte
des Honduras soit nous prenions la route à l’est mais le vent nous poussait
carrément en arrière vers le Vénezuela.. difficile à expliquer mais quand vous voyez sur l’ipad que le bateau repart
presque en arrière … cela vous mine le moral d’un capitaine, si aguerri soit
il !! alors nous avons viré, et puis viré, et encore viré, tiré des bords
et encore d’autres bords, essayé d’attraper le moindre souffle qui aurait pu
nous pousser dans le bon sens, demandé de l’aide aux enfants qui regardaient la
direction des vents, tout cela sur une mer très agitée, hachée et même hostile
par moment. Nos estomacs s’y sont fait, tous nos corps s’y sont fait mais les
occupations autre que la lecture et la « larve attitude » que
j’affectionne tout particulièrement, restaient rare tant la moindre
organisation demandait des efforts constants. Lors de la lecture d’un livre
passionnant relatant la navigation d’une frégate dans la mer des Caraïbes
(Merci à Ghislaine et Gabriel) je tombais sur LA phrase qui tue… dans notre cas…
« Naviguer face
au vent, c’est deux fois la route et trois fois la peine »
Xavier l’a retenu
celle là !!!!
Nos journées et nos
nuits étaient rythmées par de gros grains… d’abord le vent se levait fort, très
fort et très vite (la dernière nuit il est passé de 2 à 32 Nœuds puis 37 en
quelques minutes) et puis elle arrivait… une pluie si dense et si drue qu’on
pouvait voir avancer une frontière à la surface de l’eau, comme si une cascade
marchait vers nous, avec le même crépitement continu. A chaque fois nous
espérions que cela ne durerait pas mais ces fracassantes averses semblaient ne
pas vouloir cesser mêlant leurs eaux tièdes à la mer des Caraïbes.
Durant cette
traversée, seule une journée fût vraiment agréable, une journée et aussi la
nuit qui la précédât, une journée à se prélasser sous le soleil brulant, à
prendre une douche tellement vivifiante et agréable,
une journée où le vent a bien voulu cesser de tourmenter mon capitaine pour s’orienter mieux, une journée de repos avec une belle omelette pour le déjeuner !! un luxe !!
une journée où le vent a bien voulu cesser de tourmenter mon capitaine pour s’orienter mieux, une journée de repos avec une belle omelette pour le déjeuner !! un luxe !!
Après cinq jours nous vîmes enfin les côtes de l’ile de la Jamaïque scintiller de mille lumières dans une nuit plus noire que d’habitude… il était temps…nous étions fatigués.
Mais cette dernière
nuit fût une des plus sportives… il a fallu gérer des grains très violents en
prenant deux ris dans la grand voile et dans le génois, mais malgré cela nous
avancions à plus de 7 nœuds au prés serré C’est au matin du 22 janvier que nous
avons jeté l’ancre dans la Discovery Bay sur la côte Nord de la Jamaïque.
Pour rentrer dans le
mouillage il fallait suivre un alignement….
J’adoooooore les alignements… j’ai l’impression d’être dans un jeu de piste… celui là consistait à aligner deux triangles (il en existe des bien plus rigolos !!) vous voyez les triangles sur la photo ??? et bien vous vous placez de façon à ce qu’ils soient en face l’un de l’autre comme sur l’autre photo !! Trop marrant !! enfin vous me direz que je me contente de peu mais ceux qui me connaissent savent que c’est une de mes caractéristiques…..
J’adoooooore les alignements… j’ai l’impression d’être dans un jeu de piste… celui là consistait à aligner deux triangles (il en existe des bien plus rigolos !!) vous voyez les triangles sur la photo ??? et bien vous vous placez de façon à ce qu’ils soient en face l’un de l’autre comme sur l’autre photo !! Trop marrant !! enfin vous me direz que je me contente de peu mais ceux qui me connaissent savent que c’est une de mes caractéristiques…..
Vous l’avez compris, cette traversée fut plutôt sportive et relativement éprouvante autant physiquement que moralement.
Une bonne douche…. Et voilà les gardes côtes qui débarquent armés jusqu’au dents… Papiers à remplir, fouille très succincte du bateau et c’est bon !
Ce n'est pas du luxe de changer le pavillon national! |
Vous êtes en droit de
vous demander quelle route nous avons pris pour finir, après tant
d’hésitations, de virements de bord ?? nous sommes remontés à l’ouest de
l’ile puis avons contourné celle ci pour accoster à son Nord.
Sayann au mouillage de Discovery Bay |
Et nous , nous sommes
en droit de boire un bon ti punch pour fêter tout cela !